L'adolescence des vieilles
Elle fait des efforts de toilette mais ses goûts de chiottes sont contre productifs. On lui a dit d'oser les couleurs et la voilà qui marie le mauve et le vert. En croyant se rajeunir, elle se vieillit. Voilà ce qui arrive quand on fonctionne en primaire. Car quoi de plus flagrant qu'un artifice aussi parlant ? Entre la jeunesse qui se découvre et la vieillesse qui se grime, le plus abruti des passants saura tirer le groin de la vraie.
Elle est de celles qui ont du retard à rattraper comme si la vie venait seulement de leur donner les clés. Ressort lâché, elles se lâchent et les dégats prévisibles feront d'elles les mêmes victimes que par le passé. Le temps presse et au lieu de ralentir pour aller plus vite dans une reconstruction, elles accélèrent et cumulent les erreurs. L'adolescence des vieilles est des plus pathétiques. Les voilà qui se consument en consommant, qui se rident en s'éclatant et se ruinent en ravalements. Les sprints sans entrainement augurent des clacaques cinglants.
Elle chine, court et rénove, confond l'art et la déco, les plaisirs et le bonheur, l'amour et la baise, le romantisme et la niaiserie. De temps en temps, elle s'offre une croisière, certaine qu'elle pourra en parler comme d'un voyage culturel. Encouragée par ses succès cradingues, elle continue sa course contre le temps. La dernière fois, elle a vidé la litière de son chat dans les toilettes dans le but de les boucher. Son appel au secours d'un numéro d'urgence lui envoya un petit plombier stagiaire qu'elle s'empressa de déniaiser. Lui, n'en demandait pas tant et se laissa faire pendant qu'elle, se convainquait qu'elle pouvait encore plaire.
L'illusion est un tuteur qui a fait ses preuves, autant s'en resservir à l'excès.
Le langage moderne la qualifierait de cougar mais la vérité de ses exploits y ajouterait le qualificatif de virtuelle. L'assassin "vieille peau" lui irait mieux au teint, sans qu'on ait besoin de l'expliquer. Une "vieille peau" c'est une "vieille peau" et c'est irréversible. C'est le fruit pourri d'une vie pourrie. C'est un investissement, de chaque instant, durant de longues années, en des valeurs qui n'en ont pas : L'apparence et la mise en scène. Quand on a vécu de vernis, on finit craquelée. Faire l'impasse des sous-couches, c'est risquer l'effondrement.
La frime se paie. Toujours et cher.
Sauf à se spécialiser dans le déni. Un déni en couvrant un autre, comme couches de vernis se superposent, éternellement. Tant qu'un public, qui ne voit que ce qui se voit, renvoie la balle, le jeu peut continuer. Chacun y trouve son compte. Chacun sait la comédie. Et celui qui la dénoncerait serait l'empêcheur de tricher en rond. Gageons que son procès serait expéditif.