Au ralenti
Ils sont là, au-dessus des boites à lettres de l'immeuble. Ils sont trois. Dans chaque boite il y en a un autre : des annuaires, des bottins, des pages jaunes.
Vous connaissez encore des gens qui cherchent un numéro de téléphone sur un annuaire fait en arbre ? Pas moi.
Des années que cette comédie dure. Laissons de côté les platitudes concernant le développement durable, laissons de côté l'activité commerciale des vendeurs d'encarts et intéressons-nous à la difficulté qu'ont nos contemporains à être toujours à la traîne dans l'époque. Pourquoi se compliquer la vie quand elle peut être si simple ?
J'ai dû avoir ma première carte bancaire il y a plus de 35 ans. Je travaillais dans une banque à l'époque. J'étais si fasciné par les possibilités de l'outil que, bien que piètre commercial d'habitude, j'explosais tous les records de placement de carte. Comme une impression d'appartenir à une révolution, à un renouveau émancipateur, à une libération des carcans etc. etc. Oui, je "vendais" des cartes bancaires comme on ouvre des consciences, comme on brise des chaînes. J'avais l'exaltation de la jeunesse et un esprit visionnaire un peu naïf, tant j'étais persuadé que cinq ans plus tard l'argent liquide aurait disparu et les chéquiers avec. Il suffisait que chacun possède une carte et un terminal personnel. On aurait pu faire des transactions entre particuliers avec la plus grande facilité.
Quelques décennies plus tard, nous sommes toujours au ralenti. Quelques échecs retentissants comme le Moneo (qu'il aurait fallu imposer comme la carte téléphonique, plutôt que proposer) ne nous ont pas fait avancer beaucoup. Le paiement par téléphone mobile peine à prendre et on continue à ne pas vouloir bousculer les gens dans leurs habitudes, les infantilisant encore plus.
Pourtant, qui aurait parié sur le succès de l'adaptation aux lieux publics non-fumeurs et au passage à l'Euro ? Pas moi. Et pourtant, optimiste je le suis. La preuve est faite, on peut aller plus vite. Pas dans le but d'aller plus vite, mais surtout de se simplifier la vie en éliminant les actions inutiles, les déplacements inutiles et les corvées pénibles. Et on récupère le temps et l'énergie pour des choses intéressantes.
Parti des annuaires, j'ai atterri sur les moyens de paiement, un peu spontanément, mais chacun aura compris mon propos. Les exemples sont nombreux des activités et des intermédiaires qu'on maintient pour endormir, rassurer, materner ? Le chantage à l'emploi, l'a priori d'une masse idiote, les croyances bien ancrées. Autant de freins qui nous empêchent de déployer nos ailes. Tout est là, au bout de la main, ôtons nos chaussures de plomb et prenons notre envol. Et ne demandons aucune autorisation. Nous sommes surtout sous le joug de nos propres pensées limitantes.
Personnellement, je ne suis pas encore passé à la lecture numérique d'un ouvrage. J'ai du mal. J'aime trop les bouquins "physiques". Mais je ne suis pas contre l'idée qu'on me force à le faire en n'imprimant plus du tout de livres.