Le sens de la fierté
On entend souvent des parents dirent qu'ils sont fiers de leurs enfants.
Cela m'arrive aussi. Mais je ne suis pas très fier de le dire. Cela me semble bien orgueilleux. Comme si on était soi-même l'artisan des réussites de notre progéniture. C'est un peu comme un lien abusif. Ils récoltent le fruit de leurs efforts ; je m'en tiens là.
Les parents font leur travail, assument leur mission et il n'y a rien d'autre à dire. On n'attend pas de retour sur investissement d'une "élévation", d'une éducation.
En revanche, j'aime beaucoup cette idée d'être fier de ses parents.
Ce sens-là me plait, m'émerveille et m'émeut. Non pas, mais je comprends qu'on puisse le penser, que j'attende, parent, cette reconnaissance. Mais c'est plutôt dans le rôle d'enfant que je me situe.
Lorsque je pense aux moments où mon cœur s'emplissait de fierté devant les actions parentales. Leur souvenir est une émotion forte, tant elle mêle nostalgie et sentiment sans âge.
Je passe rapidement sur une fierté diffuse partagée par beaucoup. On pourrait la résumer en disant que malgré les difficultés de tous ordres, nos parents ont su tenir leur famille, travailler dur, eu du courage etc. C'est somme toute assez classique.
Mais, je m'attarderais bien sur des évènements ponctuels et souvent anodins qui bouleversent la sensibilité et parfois ouvrent le robinet :
Quelle fierté !
A l'école élémentaire c'était ma mère qui confectionnait les costumes pour le spectacle de fin d'année. Tous les costumes. Elle venait dans la classe, s'informait de la commande, prenait deux ou trois tailles standard et s'arrangeait avec la maîtresse (aujourd'hui je me demande comment celle-ci pouvait comprendre son accent).
Le plus chaud à mon petit cœur, n'était ni la réalisation, (ce n'était que du chiffon après tout), ni la présence de ma mère à l'école. C'est lorsqu'elle partait que ça me brûlait à l'intérieur. Héros jusqu'au soir. C'était mon statut. Plus rital, ni macaroni. Plus p'tit gros, ni "peu soigneux". J'étais Héros.
Parce que ma mère savait faire des choses particulières avec ses mains.
Quelle fierté !
Quand la mairie du village demanda à mon père de fabriquer l'escalier menant à la Maison des Jeunes. Il l'avait fait, tout seul, en deux samedis. Quelques marches en ciment en deux parties et qui tournaient un peu. Sur le chemin de l'école, je les voyais tous les jours. Il ne me serait pas venu à l'idée de le raconter aux autres. Mais lorsqu'un copain diffusait l'information, mon cœur s'arrêtait, gonflait, brûlait.
Parce que mon Rital de père savait faire des choses particulières avec ses mains.
Je crois vraiment qu'on est un privilégié quand on est fier de ses parents.