Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Singulier Pluriel
Singulier Pluriel
Publicité
Singulier Pluriel
Derniers commentaires
Archives
3 novembre 2013

CouLire

06 octobre 2013 (6)

Courir - Lire - Écrire.

Lorsqu'on court régulièrement, on finit toujours par exprimer son rapport à la course à pied. Je l'ai fait plus qu'à mon tour.

Mais, on finit aussi par être curieux du rapport à la course qu'ont les autres. Par soif d'apprendre ou par curiosité, pour confirmer ses sensations, on cherche des lectures. Alors voici , une petite liste qui traîne chez moi, avec des liens. Puis des extraits du dernier lu.

- La grande course de Flanagan. Tom McNab. (genre épopée)

- Courir. Jean Echenoz. (biographie romancée)

- Autoportrait de l'auteur en coureur de fond. Haruki Murakami. (Autre lien)

- Marathonien de coeur et d'esprit. Thierry Godefridi. (à fuir)

- Courir - Méditations physiques. Guillaume Le Blanc. (sérieux et parfois insaisissable)

Des extraits du dernier :

- La grandiose dualité cartésienne de l'âme et du corps se termine en leçon de parallélisme spinoziste. Nous sommes cartésiens au début d'une course, spinozistes à l'arrivée. Au commencement nous pensons toujours que notre âme est plus grande que notre corps et peut le contenir, et cela est vrai jusqu'à un certain point... Car finit toujours par advenir l'état redouté, quand l'expérience de la durée s'installe vraiment, au bout de 30 kilomètres par exemple, quand la volonté ne peut plus guider le corps.

- Le marathonien qui approfondit l'expérience de la durée s'approche toujours du chaos. Le chaos provient, non du rien, mais de l'absence d'attache. Quand vous vous mettez à flotter indéfiniment le long d'une route qui n'en finit pas, sans plus savoir pourquoi vous courez ainsi et pourquoi vous ne vous arrêtez pas... vous êtes proche du chaos... C'est l'angoisse du marathonien, mais aussi ce à quoi il désire se confronter : la limite du soi, de cet ultime point de butée dans l'espace et le temps qui se nomme désir.

- Courir est un aveu de modestie. Un pas en entraîne un deuxième puis un troisième. Rien de plus.

- Courir veut dire essentiellement ceci : le monde n'est pas à nos pieds, il n'est pas là où il devrait être, il se dérobe et c'est ailleurs qu'il faut aller le chercher.

- La course est un aveu de faiblesse et entreprise pour lever toutes les frontières. Consentir à sa faiblesse, c'est devenir nomade, proposer encore et toujours des lignes de fuite, les déterritorialiser et composer ainsi ce que Foucault appela un "traité de la vie non fasciste".

- La course est un art de la percussion. Il faut que le corps tape de manière répétée sur un sol. Cette répétition est la condition d'un chemin de calvaire ou de quasi-transe. Répéter la percussion, c'est produire un rythme.

- La douleur est universelle, la souffrance est une option.

- Les techniques d'écriture sont avant tout des techniques d'endurance... C'est l'opiniâtreté de la répétition de la tâche qui fait l'écrivain.

- Nous sommes seuls dans notre corps quand nous courons. C'est du fond de la solitude que s'établit cette expérience. Le spectateur reste au bord de l'expérience, il la conçoit mais ne la perçoit pas.

- Il se pourrait que courir soit un art de la lenteur.

- Si Descartes avait jadis affirmé que l'important est de "se rendre comme maître et propriétaires de toute chose", l'art de la course est un art non cartésien, impliquant, par contraste, de se défaire des choses, de s'envisager en toute pauvreté, comme quelqu'un qui visite un monde qui ne lui appartient pas.

- Courir, c'est inventer des noces avec le monde. Cette opération est la seule métaphysique du coureur, sa manière également de revenir en enfance. Croire que nous pouvons être présents au monde et à nous-mêmes, sans que l'un l'emporte sur l'autre, telle est bien la promesse de la course. C'est un exercice d'approfondissement des connivences entre soi et le monde.

- Il n'est pas possible d'imaginer que courir équivaut simplement à se faire plaisir. La vérité est que l'on court autant quand on a mal que quand on se sent bien.

- Les spectacles les plus consensuels laissent le monde inchangé, ne remettent nullement en question les fonctions de domination les plus criantes, les servitudes les plus accomplies. Ils procurent aux petits l'illusion de participer à la comédie des grands.

- Entre la foule spectaculaire et la foule manifeste, il semble bien qu'il ait la foule sentimentale des coureurs de fond. La première est immobile, la deuxième marchante, seule la troisième est coureuse. Ce changement de rythme n'est pas sans portée. La foule de coureurs ne s'identifie ni à un rassemblement engendré par le concert d'une idole ni à une manifestation.

- Peut-on apprendre à ne pas prendre le dessus sur les autres ?... Le gouvernement de soi n'est jamais autant à son comble que quand il refuse de s'exercer contre les autres.

- La course met naturellement les pensées en mouvement.

- Courir est plus que se divertir ou faire diversion. Courir est une philosophie.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité