Ils passent leur temps à dire Je t'aime (2009)
Ils ne le savent pas eux-mêmes qu’ils passent leur temps à dire Je t’aime. Le déguisant le plus souvent, en un Bonjour un jour, en un Bonsoir un soir, un Merci par ci, un ça va ? par là.
Ils passent leur temps à dire Je t’aime
On leur répète que C’est pas bien. C’est très dangereux. Faut se protéger. Ils essaient bien un jour ou deux, et puis repartent à l’assaut. Et les Je t’aime, comme au galop, reviennent.
C’est d’un regard ou d’un sourire qu’ils vous enveloppent sans intention. Puérils aux yeux des efficaces, ils ne connaissent pas d’autres mots. Ils passent leur temps à dire Je t’aime. Même en silence, ils disent Je t'aime. Aux inconnus, ils disent Je t'aime. Même aux haineux, ils disent Je t'aime.
Ils sont de ceux qui caressent la main qui les frappe. Bras ouverts et paumes au ciel, ils prient sans le savoir. Ils abreuvent d'une prévenance, proches ou lointains qui acceptent de boire, qui acceptent de croire qu'ils sont prochains.
Ils passent leur temps à dire Je t’aime
Selon les codes communs, ça ne rapporte rien. Suivant leurs cœurs divins, ils ne s’attendent à rien. Pauvres Martin, ils sèment pour demain.
Ils passent leur temps à dire Je t’aime. A des oreilles souvent scellées, pavillons barbelés. A d’autres cœurs parfois gelés, débranchés. A des comptables de la vie, thésauriseurs. A des guerriers du quotidien, compétiteurs.
Vous pouvez faire ce qu’il vous plaît. Ils ne feront que ce qu’ils voudront. C’est jusqu’au bout, c’est jusqu’au fond. C’est jusqu’au trou, qu’ils passeront le temps qu'il reste à dire Je t'aime.