L'élégance sérieuse

J'ai vécu hier matin un moment très rafraîchissant. L'intelligence, la dignité et la noblesse existent. Je n'en doutais pas bien sûr. Mais, lorsqu'elles illuminent le petit écran (plus si petit que ça de nos jours) c'est un bonheur d'imaginer que leur personnification est accessible à tous.

Je vais éviter de donner des noms, mais, je suis obligé de citer la source de mon idée de billet. Il s'agit d'une interview assez longue du frère de l'otage Français "qui s'est libéré" avant-hier.

Quelle leçon ! Des réponses posées, dans un langage clair et sobre, un vocabulaire juste et précis, une assurance impressionnante, une dignité visiblement partagée par la famille, une maîtrise des réponses malgré les tentatives d'orientation des journalistes. Aucun superflu et aucune théâtralisation. Pas plus d'exagération du courage et pas de surprise de l'exploit. Le sang-froid, c'est beau !

La veille, j'avais été assez choqué par l'ébullition chez un autre membre de la famille. L'interviewé à qui on relatait cette réaction a simplement dit qu'il était, lui, moins dans le pathos et l'émotionnel. Bien envoyé ! Avec formes et délicatesse. L'élégance sérieuse, c'est admirable !

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"Mettre en plein soleil, son coeur ou son cul, c'est pareil" chantait Brassens. Qu'il avait raison ! 

Nous avions déjà fait la différence entre sensiblerie et sensibilité (re-publication imminente). Intéressons-nous aux émotifs qui se disent sensibles quand ils sont surtout fragiles. La sensibilité ouvre des portes et des horizons quand l'émotivité enferme et handicape. Nous avons trop tendance à dire qu'il faut écouter ses émotions au lieu de proposer de les gérer. Les écouter est souvent interprété comme une justification. Aussi, les débordements qui font des dégâts se voient minimisés ; on y ajoute, grand seigneur, que c'est humain. Non, ce qui est humain, c'est de maîtriser ses émotions pour ménager l'harmonie. Certes, la gestion demande des efforts de connaissance et de discipline, mais c'est si riche pour tout le monde que cela en vaut la peine.

Le sang-froid n'est pas inné. C'est un sport qui demande un entraînement permanent. La discrétion apporte de la noblesse à tout acte. La justesse de la parole habille le discours d'une authenticité bienfaisante. Le calme respecte les autres. La modestie élève et donne l'exemple. La simplicité crée un lien généreux. L'économie d'artifices prouve qu'on n'a rien à prouver. La dignité, ça se décide, surtout dans une époque où le devant de la scène attire la plupart ; le désir du quart d'heure de gloire n'a pas échappé à tout le monde. C'est dommage.

Comments

[MIKELIMA]

Votre réflexion me fait songer au peuple japonais touché par le désastre du tsunami et de l'explosion de la centrale de Fujushima. Sur les écrans pas de lamentations pas de pleurs pas de haine. La dignité dans la tristesse et la douleur, l'économie des sentiments et une approche froide de la fatalité. Tout du moins à l'éxtérieur. Merci pour votre article.

[Stéphane]

A peine le nouveau parti créé que déjà les cadres s'y congratulent :)))

[Stéphane]

Superbe et salutaire, rien à ajouter sinon le sempiternel débat inné/acquis. Oui, certains individus sont naturellement dotés d'un plus grand sang-froid que la moyenne. Et c'est toujours, voire uniquement, devant les situations extrêmes (subite notoriété, richesse soudaine, danger mortel, panique générale...) que cela se vérifie. Parfois, des individus qui ont l'air zen en situation normale, se révèlent soudain très décevants... Oui, cela se travaille effectivement, mais la vie et ses rebondissements est là pour nous faire tous progresser sur cette maîtrise de nos émotions. Il y faut surtout l'expérience de vrais dangers et/ou de situations réelles de notoriété, de réussite, pour travailler là-dessus...