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13 novembre 2012

Le "Tigre" de Villefranche

05 août 2012 (4)

Il pleuvait fort ce matin-là. Mais, il n'était pas question de manquer ma séance de course à pied. Plus par devoir que par plaisir, je mettais un pied devant l'autre et les deux dans les flaques d'eau, sans conviction et avec le seul objectif de la satisfaction du retour. Je ne m'attendais qu'au temps qui passe et à l'eau qui tombe. Aucune starlette éblouissante à prévoir, aucune sportive ensoleillée imaginable et pas plus de poésie portée dans un couffin de marché, sur un vélo altier ou entre des doigts de promeneurs enlacés. "Ce sera triste et ce sera fait". Voilà, ce que je me suis dit. C'était sans compter sur la Providence (que chacun appelle comme il veut d'ailleurs) toujours bonne copine.
La descente était raide et je regardais mes pieds, prudent comme un coureur expérimenté donc échaudé. Lorsque je relevai les yeux, mon cadeau du jour était là :

Le physique de Jacques Tati, la moustache de Clémenceau et l'âge des deux réunis en imaginant qu'ils ne soient morts ni l'un ni l'autre. Il gravit la colline sans toucher le sol. Ses longues jambes semblent échasses. Il est vivace, vivant et pourtant il devrait être mort tant il parait vieux. Alerte comme un cheval fougueux, il file vers le haut quand je me retiens de glisser vers le bas. Sa silhouette est longiligne comme un trait de crayon optimiste. Les épaules ouvertes offrent sa poitrine à la pluie devenue battante, sans qu'elle ne l'impressionne plus que ça. Il brave la tempête, comme il a dû le faire depuis toujours. Le parapluie est là. Mais, refermé et accroché à l'avant-bras. On a dû l'obliger à le prendre. L'imperméable est noir et le béret aussi. Un vrai béret, celui des clichés de chez nous. Cette image aurait largement suffi à mon bonheur du jour. Largement. Mais, les cerises subliment souvent les gâteaux et c'est là, que le large sourire de Clémenceau me lance un "Bonjour" franc, droit, jeune et dynamique. Ma main se lève, mon sourire ouvre les volets, ma réponse intimidée sort et mon corps instantanément se courbe. Le Monsieur mérite la révérenceIl a deux cents ans, vous dis-je et l'énergie d'un amoureux. Fougueux et sage, il partage. Voilà, c'est décidé, Monsieur qui passiez, je vous emmène sur mon dos pendant mon prochain marathon. Je ne pourrai être en meilleure compagnie. D'ici là, je ne courrai plus, je volerai Monsieur. Pour vous.
Cette scène n'aura pas duré cinq secondes. Il y en a de la vie en cinq secondes.

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Commentaires
C
C'est beau Claudio !
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C
"des limousines" plus bovines qu'immatriculées en principauté je suppose ;-)
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E
C'est vrai que la vieillesse de certains est belle à observer et rassure, emerveille!<br /> <br /> j'ai couru aussi ce matin mais je n'ai qu'un écureuil, un héron, et des limousines à opposer à ce tigre, bref je suis ridicule mais me retrouve quand même dans ton billet dans le mode contemplatif
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