Un monde nouveau
Rien à faire. Je ne m'y fais pas.Les années passent et devraient, me dit-on, me rendre plus indulgent, plus sage. Certes, je le crois et je crois aussi qu'elles le font. Mais, elles me rendent aussi plus amoureux de mes frères d'humanité, plus ambitieux pour nous tous. Aussi, certaines choses durent. Un exemple : Je ne parviens toujours pas à comprendre comment un être normalement constitué peut s'affubler, décembre approchant, d'un bonnet rouge et blanc, parfois agrémenté d'une guirlande hoquetante. Sans doute que la conscience ainsi capuchonnée n'a des sursauts de lucidité que par intermittence.
J'aurais bien aimé que le ridicule tue, une bonne fois pour toutes et depuis toujours. Chacun aurait eu le temps depuis de se garder d'insulter son être, ses aïeuls et l'humanité toute entière en se vautrant dans la fange commune et vulgaire. Puisque la tempérance ne suffit pas, comptons donc sur la prudence.
Un peu de décence que diable ! Redressez votre colonne ! Pensez à vos enfants ! Regardez les miroirs !
On parle ici de constats faits sur des adultes. Il ne s'agit pas de fustiger des enfants ; c'est leur boulot de s'amuser, d'imaginer, de voyager dans leur tête. Et par ailleurs, ils ne choisissent pas souvent eux-mêmes. Mais des adultes, des vrais, des adultes depuis bien longtemps parfois ! Comment comprendre ?
Il arrive même que les capuchonnés suivent la troupe ou les ordres de leur patron. C'est sans doute le cas des caissières de supermarché. Obligées, diront certains. Complices pourrait-on ajouter. Complices parce que consentantes et trop obéissantes. Pire, il y a des chances qu'elles prennent du plaisir à se ridiculiser ainsi. Dans ce cas, elles n'ont que ce qu'elles méritent. Caissières. Je veux bien compatir, mais un sursaut de dignité serait le bienvenu.
Ca me donne la nausée ce spectacle. Mais c'est toujours le même discours et je sens bien que je radote, mais, que voulez-vous quand on a l'ambition de rendre le monde meilleur, on ne se satisfait ni du festif, du divertissement et de la rigolade, ni du conformisme, du conventionnel et du conservateur. On lui préférera la joie sérieuse, la créativité enrichissante, la fraternité généreuse comme l'action révolutionnaire, l'individualité courageuse et les lendemains qui changent.
Pourquoi devrait-on attendre l'apocalypse pour nous obliger à changer ? Imaginons qu'elle ait eu lieu et créons un monde nouveau sans coiffe ridicule, éteignoir de pensée.