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Singulier Pluriel
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2 septembre 2013

Il a fini par...

Il a fini par m'appeler. Six mois de silence inquiétant. Il y avait bien ces SMS qui arrivaient de façon irrégulière. Tantôt abscons, tantôt ésotériques et toujours alarmants. Mal, le gars va mal. Depuis longtemps et la pente ne change pas de sens.
Je le savais au bord de la fenêtre avant l'été. J'ai fait ma part mais, à distance, ma part est fine. J'ai fait comme j'ai cru bon de faire, ni trop compatissant, ni trop rebooster. Je me dis que c'est déjà ça. Mais six mois au bord d'une fenêtre à se pencher puis se retenir, à faire le balancier sans se balancer et sans revenir, c'est dur et c'est long.
Il a fini par m'appeler. Depuis que les coups de fil sont gratuits, les bras de l'écoute embrassent plus tranquillement. Il m'a dit avoir des envies successives, de suicide, de meurtre et de fuite en avant. Pas peur de la mort, pas peur de la prison et pas peur de la misère. Juste peur de la vie.
Mon oreille gauche a senti l'heure passer mais n'en a rien dit. Ma voix est restée alerte, vive et gaie, faisant mine de n'être pas affectée par la détresse de l'ami. J'ai ramené au réel, au pratique, au quotidien comme pour remettre les pieds sur terre. C'est seulement plus tard, que les trapèzes se sont durcis, que le poids sur les épaules a fait courber le dos, que la bande sonore s'est déroulée vingt fois dans la mémoire.
J'ai promis de "faire un saut" dans l'année à venir (pour lui éviter le sien ai-je pensé sans le dire). J'ai promis.
Ses soixante berges ont osé me dire des choses sans retenue et sans pudeur. C'est puissant. C'est humain. Humain.
Il a fini par m'appeler. Mais pourquoi a-t-il cru bon de conclure par : "Voilà, s'il m'arrive quelque chose, tu auras le droit de réclamer une part de mes cendres ?"

...

le hibou

Il a fini par partir.
Vieil oiseau de nuit, au bout du rouleau de la vie, le hibou meurtri a quitté son perchoir, sa balançoire. Il ne sautera pas dans le vide, ne videra pas son chargeur et ne se fera pas sauter le caisson.
Le vieil hibou a choisi.
Il a pris un oiseau d'acier à prix d'or, un sac à dos pour tout bagage. Advienne que pourra ! Page blanche et saut dans un vide métaphorique. S'est envolé en passager le hibou. Recroquevillé comme un foetus en attente d'avenir. Soixante berges et apeuré comme l'enfant battu, abîmé, abandonné qu'il fut.
Va mon Frangin, tes ailes d'oiseau de nuit accueilleront le possible et te remercieront du risque. Ce n'est plus ton choix. C'est le choix.
Va. Tu as pris les pas de Gauguin sur la musique de Brel. Tu seras oiseau de jour et de liberté, albatros conquérant, aube d'un nouveau jour.
Il a fini par écrire.
Même les étoiles sont différentes, dit-il. Il parle de pêche et de poisson cru, d'averses d'eaux chaudes et de senteurs, de chant d'oiseaux et de lagon. Et des mots comme bonheur et authentique, contacts et invincible, rencontres, rigolade, donnent des couleurs à son écriture qui n'était plus que faire-part mortuaire, parchemin dégringolant, cortège funèbre.
Peins-le à la Gauguin ! Chante-le à la Jacky ! Croque-le, ton Eté Indien, il te va bien.
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