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19 octobre 2020

notre dame de Spéluque

Image_343

C'était avant l'été. Je découvrais le chemin de randonnée de mon village. Concentré sur mes pas, je levais les yeux de temps en temps pour apprécier le paysage. Après une descente caillouteuse vers la rivière et une remontée sportive sur un plateau, je sortais d'un sous-bois. D'un coup le paysage large, découvert, m'explosa au visage. La forêt, les champs, le chemin de terre, une église, Notre-Dame-de-Spéluque, et...

...au milieu du chemin, une silhouette.

Nous sommes à 600 mètres d'altitude, en pleine campagne. Qu'une église soit venue se planter là, c'est déjà surréaliste. Mais, chaque pas me menait vers plus étonnant encore. J'étais déjà troublé. Ma marche ralentit. La photo de la scène aurait été belle, mais je n'oserai pas. Nous allions, la silhouette et moi nous rencontrer, le tracé du chemin l'écrivait. Me voilà donc, au milieu de nulle part face à une soeur, une bonne soeur, une religieuse. Par réflexe, je la salue par un "Bonjour ma soeur" assez désuet mais qui m'est venu comme ça, d'un coup, sorti d'un passé pas tout à fait passé.

Elle a, selon moi, une nonantaine évidente. Elle marche à petits pas prudents sur le sentier cabossé, une canne à la main. Je vois d'abord ses bas de contention puis, remontant, une montre connectée, sans doute de celles qui permettent de prévenir en cas de problème. Les mains noueuses qu'on a à cet âge me marquent, agréablement. Les yeux d'un bleu vif achèvent de m'impressionner. Je bafouille une conversation banale tout en m'imaginant caresser ses rides profondes. Elle pourrait être ma mère et je la vois comme ma grand-mère. La religieuse m'explique habiter la maison basse là-bas à quelques centaines de mètres et venir jusqu'à l'église faire sa promenade quotidienne. Elle croise souvent des randonneurs. Elle en est heureuse. Elle m'instruit sur l'activité de Notre-Dame-de-Spéluque : l'été, des paroissiens avertis, qui se renseignent sur Internet, viennent jusqu'à elle pour assister à des chants grégoriens. 

Je suis vraiment intimidé. Du coup, je me presse de conclure. Impressionné par cette vie simple, loin de tout et figé par le regard perçant j'en perds la parole. Je l'aurais bien embrassée ma dame de Spéluque mais certaines choses ne se font pas. En tous cas pas la première fois.

Je suis repassé deux fois depuis devant l'église. La première fois j'ai vu ma soeur assise sur un banc à l'ombre d'un chêne près de l'église, elle mangeait un biscuit. De loin, j'ai fait un signe de la main. La seconde fois, personne. Ah si, une biche est venue me saluer par des bruits dans les broussailles puis m'ayant fixé une seconde, s'en est allée, légère, noble et aérienne.

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