Indignez-vous ?
A tous ceux qui avaient profité d'une occasion médiatique de s'emmieler d'indignation à deux balles qui les exonérait d'efforts pour se bien comporter, protégés qu'ils étaient par une figure emblématique inatteignable puisqu'on ne touche pas aux icônes au risque de se griller à vie, sur des écrans, dans son entourage et au coeur de la foule ébahie, je dis que leur porte-étendard étant parti, le projecteur qui l'éclairait de si près qu'il faisait de l'ombre à tous, est désormais orphelin et aveugle, qu'ils sont désormais à découvert, qu'il est l'heure de prouver à deux pas de son palier qu'approuver, tartiner, s'émouvoir, se pâmer, ont fait long feu, que désormais on fera dans sa propre ombre, en silence et sans le confort des bien-pensants, ce qu'on dit, ce qu'on clame, ce dans quoi on se drape, que désormais on passe à la vitesse supérieure, que l'indignation bonne conscience aura au moins servi à vous faire sortir du bois, à vous mettre aux manettes, à vous faire balayer devant chez vous au lieu de défiler sous les caméras, à vous prendre en charge au lieu de frimer en choisissant le camp qui rapporte au royaume des illusions. Quand on est passif, pion d'une foule dans l'air du temps, qu'on soit résistant on en est pas moins collabo de la circonstance. C'est dans les tempêtes qu'on découvre les braves et nos temps sont trop confortables pour faire de velléités des philosophies et d'opportunistes des messies. Les suiveurs restent des suiveurs qu'ils suivent un dictateur ou qu'ils suivent un héros. Bougez-vous en silence, bougez-vous en coulisses, bougez-vous sans retour plutôt que partager de la bien-pensance combleuse de vide intérieur, masque de caractère plat, de personnalité fade, d'être dépendant, des idées des autres, du regard de la masse, du retour d'un miroir complaisant. Ne vous indignez plus, soyez dignes.